Le fils, de Philipp Meyer

C'est un peu convenu d'employer le terme de saga, mais si une oeuvre mérite ce qualificatif, c'est bien Le fils.

Le roman a l'ambition de retracer l'histoire du Texas à 3 époques décisives : 1850, 1915 et 1945, à quelques années près.

En 1850, le Texas est en proie aux guerres indiennes contre les Comanches.

En 1915, les Américains "blancs", installés dans d'immense ranchs, oppriment les Mexicains installés dans la région, et s'approprient leurs terres.

En 1945, l'industrie pétrolière se développe sur ces terres rendues arides par l'élevage, et renvoie au passé le mode de vie des cow-boys.

Résumé ainsi, ce n'est pas forcément très attirant, mais Meyer décrit avec authenticité et puissance ces périodes historiques par le biais du destin de 3 membres d'une même famille, issus de 3 générations.

En 1850, à 14 ans, Eli est capturé par les Comanches après le massacre de sa famille. Il trouve auprès de ces Indiens une nouvelle famille, une vie dure et violente, mais qui lui convient et où il trouve sa place. Cela n'aura cependant qu'un temps, car sa tribu finit par être anéantie, essentiellement par la variole propagée par les blancs.

En 1915, Peter, 45 ans, est le fils d'Eli. Il travaille sur son ranch, conquis par la violence et le travail. Eli est devenu un patriarche irascible, auquel Peter s'oppose, en particulier concernant le traitement réservé aux Mexicains voisins. Isolé au sein de sa communauté, Peter finit par la rejeter pour se mettre en accord avec ses idées progressistes.

En 1945, Jeanne-Anne, la petite-fille de Peter, a l'occasion de décupler la fortune familiale en investissant dans le pétrole. Au moment de mourir, en 2012, elle repense à son parcours et aux difficultés qu'elle a rencontrées pour s'imposer en tant que femme dans ce milieu macho.

Les 3 histoires sont intéressantes. Elles sont menées en parallèle, ce qui est un peu frustrant et même parfois pesant vu le nombre de pages du livre. Je crois que j'aurais préféré, plus classiquement, lire 3 tomes linéaires de cette fresque. Bien sûr, l'histoire familiale pèse sur les destins individuels, ce que la construction alternée met en évidence. Les trois points de vue sont intéressants et complémentaires. Bizarrement, seuls les deux hommes s'expriment à la première personne, alors que les chapitres de J-A sont écrits à la troisième personne.

Le point fort du roman est avant tout la richesse de la documentation historique que fournit l'auteur sur ces périodes. Passionnant pour qui s'intéresse à la construction des Etats-Unis !

J'ai trouvé dans ce roman ce qui me séduit à coup sûr : une écriture cinématographique, qui m'a immergée dans d'autres lieux et d'autres époques, et des personnages forts et complexes.